dimanche 14 décembre 2008

De Mirò à Warhol: La Collection BERARDO à Paris

D'habitude je boycotte les expositions du Musée du Luxembourg. La dernière que j'étais allée voir était La Collection Philipps il y a plus de deux ans. Les organisateurs semblent d'ailleurs privilégier deux thèmes pour leurs expositions dans les galeries du Sénat: la présentation de collections privées (les collections du Dr Rau, Philipps, Berardo etc) et les monographies de très grands artistes (Raphaël, Véronèse, Titien, Arcimboldo, Vlaminck). Mais voilà, au Luxembourg, ce sont toujours les mêmes problèmes: l'entrée coûte excessivement cher (le tarif étudiant est à 10€), les expositions sont très petites (il y a 5 salles, et c'est toujours le même parcours), les cartels sont minimalistes et les textes aux murs ne font qu'évoquer en 4 lignes ce dont il est question dans la salle où l'on pénètre.

J'avais décidé de ne plus jamais aller à ce genre d'exposition mais voilà, j'ai reçu une invitation pour visite avec conférencier, petit déjeuner etc, je ne pouvais raisonnablement pas refuser. De plus, je préfère la présentation de collections privées aux monographies tapageuses et souvent ratées. Je trouve intéressant de connaître et comprendre, "en plus" des oeuvres, ceux qui les ont acquises. Les expositions Rau, Philipps ou Vollard (au musée d'Orsay en 2008), que j'avais toutes trois appréciées, sont de celles qui permettent de découvrir la personnalité d'un amateur d'art, ses inclinations, l'histoire de sa collection et sa place dans l'histoire plus générale du goût, du collectionnisme et/ou du mécénat.

La collection Berardo est celle d'un homme d'affaire portugais qui, né en 1944, a fait fortune en Afrique du Sud en exploitant des domaines phares au XXe siècle: l'or, le commerce du vin, la banque et les télécommunications. Amateur d'art mais se jugeant lui-même trop peu habile à l'acquisition des oeuvres, il chargea plusieurs personnes au cours des années 1990 de lui constituer une très riche collection d'art moderne et contemporain (plus de 800 oeuvres).
L'exposition du Luxembourg, orchestrée par André Cariou (conservateur au Musée des Beaux Arts de Quimper) propose un échantillon - et par conséquent une vision très subjective - de cette collection à travers environ 80 oeuvres. Vision d'autant plus subjective qu'elle bannit quasiment l'art contemporain et se concentre sur la période moderne. Le fait que le public du Luxembourg soit en très grande majorité constitué de personnes âgées aisées et plutôt traditionnalistes n'y est certainement pas pour rien.
De très belle qualité, les œuvres exposées permettent, selon l'accrochage, d'illustrer avec pertinence quelques grands mouvements de l'histoire de l'art du XXe siècle. La part belle est faite au Surréalisme (Magritte, Masson, Dalì, Mirò, Arp), au Pop Art & Nouveau Réalisme (Warhol, Tingely, Mimmo Rotella, Klein, Villeglé), aux abstraits lyriques (Joan Mitchell, Riopelle, Helena Vieira Da Silva) ainsi qu'aux abstraits géométriques (Hélion, Mondrian, le Bauhaus et De Stijl).
D'un point de vue esthétique l'exposition est assez réussie, la qualité des œuvres est au rendez-vous et il est assez fascinant d'imaginer la très récente constitution de cet ensemble qui a moins de dix ans. Cependant une impression très froide se dégage de ce regroupement. Il est vrai que les surréalistes et les abstraits géométriques privilégient rarement les couleurs chaudes, mais il est frappant de constater que la quasi totalité des oeuvres présentées est dans les tons bleu, vert et gris (un immense Warhol bleu, un IKB, un Joan Mitchell bleu, un Hélion très froid, un Pollock "chamaniste" bleu également...).
D'un point de vue muséographique et pédagogique c'est la déception habituelle.

Une exposition très chère, très courte, sans explication, très subjective par rapport à la collection qu'elle souhaite représenter. Comme me disait une petite grand-mère très charmante à l'accent toulousain: "Vous savez, moi je suis venue pour les peintures!" Encore faut-il avoir les moyens...

Photographies:
[1] Tom Wesselmann Great American Nude #52, 1963 © Adagp Paris 2008
[2] Andy Warhol Ten-foot Flowers, 1967 © Adagp Paris 2008
[3] René Magritte Le Gouffre argenté, 1926 © Adagp Paris 2008

Jusqu'au 22 février 2009.
Lien: http://www.museeduluxembourg.fr/

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Je n'irai certainement pas voir l'expo... Boycott oblige! Mais merci pour la grand-mère à l'accent toulousain!!!

Allie a dit…

ça me rassure de voir que je ne suis pas la seule à boycotter les expo du Luxembourg (exactement pour les mêmes raisons...), la dernière fois que j'y étais allée c'était pour Botticelli (en 2003 donc ça date vraiment) et c'était ça, 5 pauvres salles pour 1h d'attente au bas mot, et un tarif déjà élevé...